Fin avantage fiscal gazoil poids lourds

La fin de l’avantage fiscal pour le gazole routier ?

Samedi 10 avril dernier, les députés ont voté à une grande majorité la suppression à l’horizon 2030 d’un avantage fiscal dont bénéficie le gazole routier : la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

 

En adoptant largement cette mesure, qui s’inscrit dans le projet de loi climat, les députés souhaitent donner un coup de boost au renouvellement de la flotte des poids lourds au gazole au profit de l’hydrogène, du biogaz et du biodiesel. Objectif final : la fin des poids lourds à énergie fossile à l’horizon 2040. Mais ces changements ne se feront pas sans conséquences d’après les députés de droite.

 

Projet de loi Climat et Résilience : les avis divergent

Le moins que l’on puisse dire est que la loi Climat et Résilience crée débat. Cette dernière inclut notamment la potentielle mise en place d’une écotaxe dans les régions volontaires, comme l’Alsace, et la suppression progressive d’un avantage fiscal sur la taxation du gazole pour les professionnels à l’horizon 2030, visant à interdire la commercialisation des poids lourds utilisant des énergies fossiles (diesel ou essence) en 2040. Pour rassurer les députés, le corapporteur du texte à l’Assemblée Nationale, Jean-Marc Zulesi, avait précisé qu’ils n’étaient pas là pour “recycler l’écotaxe » de 2013, qui « était imposée par Paris dans l’ensemble des régions ». Une mesure qui avait d’ailleurs été abandonnée en 2014 suite au mouvement des bonnets rouges. La présidente de l’Ile-de-France, Valérie Pécresse, est, quant à elle, « favorable à l’écotaxe, mais uniquement pour les poids lourds en transit, ceux qui nous polluent et ne nous apportent aucune valeur ajoutée ».

 

Le 26 mars dernier, deux cent vingt-huit personnalités politiques, principalement des députés et des sénateurs, ont publié sur le site de France Info une tribune pour réclamer une vraie loi pour le climat. Parmi les signataires de cette tribune, on retrouve : Clémentine Autain, députée de Seine-Saint-Denis, Julien Bayou, secrétaire national EELV, Grégory Doucet, maire de Lyon, Benoît Hamon, conseiller régional d’Île-de-France, Anne Hidalgo, maire de Paris, Yannick Jadot, député européen, ou encore Noël Mamère, ancien député de Gironde. Ils s’insurgent d’un “projet de loi amoindri ne permettant pas d’atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas carbone”. Du côté de la République en Marche, les députés se montrent plus timides sur le sujet et ont tendance à se ranger derrière l’Europe en attendant les directives qui seront données lors de la présidence française du Conseil de l’Union européenne au premier semestre 2022. Le 4 mai dernier, après 110 heures de débats, l’Assemblée nationale a finalement adopté le projet de loi Climat et résilience en première lecture. Ce dernier est attendu au Sénat au plus tard en septembre.

600 000 véhicules concernés

La fin de cet avantage fiscal concernerait plus de 600 000 poids lourds diesel en France. Ces derniers représentent environ 24% des émissions de gaz à effet de serre, contre 54% pour les véhicules particuliers. Pour rappel, les transports sont responsables de 30% des émissions en France. Le député Jean-Marie Sermier s’inquiète de cette mesure qui pourrait s’avérer problématique pour les entreprises françaises qui n’auront pas les moyens de renouveler tous leurs engins. Pour ce dernier, « il faut arrêter ce camion bashing depuis quelques années ». La France compte un parc de 600 000 camions qu’il faudrait changer tous les 6 ans et pour Jean-Marie Sermier,  il n’y a pas « de capacité industrielle de massifier la production pour produire suffisamment de camions ».

 

Pour faciliter cette transition, le ministre délégué aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, prévoit des « aides directes pour accompagner le secteur à acquérir des engins plus vertueux». Concrètement, ces aides pour un passage à l’électrique et à l’hydrogène s’élèveraient à 50 000 euros pour les camions et 30 000 euros pour les bus et les cars de tourisme. Le problème ? Ces modèles sont très peu nombreux à la vente dans ce type de motorisations, voire inexistants. D’ailleurs, le député OTRE, Jean-Marc Rivera réagit en spécifiant: « On nous parle d’aides au financement, mais pour des véhicules qui sont aujourd’hui inexistants… On se moque un peu de nous.» Pour accompagner cette mesure d’ici 2030, il faudra, sans conteste, que le gouvernement et les constructeurs se concentrent sur le développement de l’électrique et de l’hydrogène pour les poids lourds. Le ministre indique que ce renouvellement prévu pour les 10 à 20 ans à venir s’inscrit également dans une politique européenne qui sera précisée lors de la présidence française du Conseil de l’Union européenne au premier semestre 2022.

 

La loi Climat, une préoccupation de la population

Le climat n’est pas qu’une préoccupation gouvernementale. Pour preuve, en mars dernier, à la veille de l’examen de la loi à l’Assemblée Nationale, ce sont plus de 110 000 personnes qui sont descendues dans la rue pour demander à l’Etat d’aller encore plus loin dans la loi Climat. Des dizaines d’ONG, de syndicats et des partis politiques se sont associés à cette marche. Le but étant de dénoncer “le manque d’ambition” de ce projet de loi. Pour rappel, Emmanuel Macron avait constitué un groupe de 150 citoyens tirés au sort chargés de travailler à la proposition de mesures permettant la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40% : la Convention citoyenne pour le climat. La révolte résulte du fait que, d’après ce groupe de citoyens, il ne restait plus grand chose de leurs propositions dans la convention, une fois le passage effectué dans les institutions françaises. “Les textes ont été modifiés, dilués, voire mis de côté, je me sens trahie.” témoigne Nadine Breneur, membre de la commission.

 

Lors des manifestations du mois de mars, les manifestants avaient appelé les parlementaires à revoir le projet de loi pour lequel pas moins de 7 000 amendements avaient été déposés. Dans ce qui est proposé dans la loi, tous ces amendements semblent être passés à la moulinette. La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a largement contribué à ce projet de loi et a déclaré sur France Inter, « Il s’agit là d’une des plus grandes lois du quinquennat.» La ministre soutient la mobilisation de la population, « les marches pour le climat, c’est très bien qu’elles existent. Je suis heureuse que cette préoccupation soit toujours là. »

 

 

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