Allemagne investit pour l'hydrogene

L’Allemagne mise sur l’hydrogène

La presse allemande a dévoilé en février dernier la volonté du pays de miser sur l’hydrogène pour atteindre la première place industrielle. Un souhait qui prend forme. La révolution automobile allemande est en route !

L’Allemagne veut couvrir 20% de ses besoins avec de l’hydrogène décarboné d’ici 2030. Le pays mise sur le développement de ses équipements et solutions afin de couvrir toute la chaîne de valeur, de la production à l’acheminement, pour les exporter dès 2024. Mais les projets de l’Allemagne ne s’arrêtent pas là ! Le pays prévoit également la mise en circulation de 60 000 voitures particulières à hydrogène d’ici à 2021, avec notamment 2,1 milliards d’euros de primes pour les automobilistes jusqu’en 2023. Les laboratoires de recherche recevront pour leur part jusqu’à 600 millions d’euros d’ici 2025. Voici tout ce qu’il faut savoir sur l’hydrogène et les projets de l’Allemagne.

9 milliards d’euros d’investissements en Allemagne

On n’a rien sans rien ! Et l’Allemagne le sait. Si le pays veut développer l’hydrogène et atteindre la première place dans la décennie à venir, cela se paie… 9 milliards d’euros vont ainsi être investis dans les prochaines années pour permettre au pays de devenir le premier producteur et utilisateur d’hydrogène. 7 milliards pour développer le marché intérieur et 2 milliards pour conclure des partenariats internationaux. L’Allemagne vise une capacité de production de 5 Gigawatts d’ici à 2030 et 20 Gigawatts avant 2040. L’annonce a été faite par le ministre de l’Économie, de la Recherche et des Transports le 10 juin dernier. L’enjeu pour les gouvernements va être de miser sur l’énergie du futur. Voilà des années que l’on parle de ce qui peut venir en alternative au pétrole. Aujourd’hui, cela devient de plus en plus concret.

La crise sanitaire a également accéléré le processus avec l’enjeu environnemental mais aussi l’idée de relocaliser ses productions. Pour cela, déjà en novembre 2019, Air Liquide testait à Duisbourg, en Rhénanie du Nord-Westphalie, un système d’alimentation basé sur l’hydrogène pour les hauts fourneaux de l’aciérie. « L’objectif de la neutralité climatique d’ici à 2050 ne pourra être atteint qu’avec un hydrogène obtenu à des prix compétitifs, grâce à une production nationale et via les importations », a déclaré Holger Lösch, le vice-président de la fédération des industries allemandes.

Qu’en est-il en France ?

La France, quant à elle, a prévu d’investir 100 millions d’euros par an pendant 5 ans dans le cadre du « Plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique » présenté en 2018. Le gouvernement espère avoir aidé à financer 250 mégawatts d’électrolyseurs d’ici 2023. Des appels à projets pilotés par l’Ademe ont été lancés au second semestre 2018. L’autre moitié de l’enveloppe du plan sert à développer la mobilité hydrogène, en passant de 263 véhicules roulant à l’hydrogène en France en 2017, avec une vingtaine de stations de recharge dédiées, à une centaine de stations en 2023. Celles-ci permettraient de ravitailler 200 véhicules lourds et 5 000 véhicules utilitaires. Ce plan vise aussi à déployer d’ici 2028, 400 à 1 000 stations, pour faire rouler 20 000 à 50 000 véhicules utilitaires et 800 à 2 000 véhicules lourds. Le gouvernement va par ailleurs commander aux gestionnaires des réseaux de gaz GRDF et GRTgaz un rapport sur les possibilités d’injection d’hydrogène dans leurs réseaux afin de remplacer en partie le gaz naturel.

Ces mesures peuvent paraître dérisoires par rapport à l’investissement de l’Allemagne mais cela a tout de même le mérite d’être à l’ordre du jour. Le fait de ne pas faire un choix commun et collectif avec l’Europe sur le développement de cette énergie peut être regrettable. Cela aurait pu donner plus de poids à l’Europe sur le marché automobile mondial. D’autant plus que l’Europe détient les meilleurs industriels mondiaux dans le Conseil de l’hydrogène comme Michelin, Air Liquide, Alstom et Siemens.

Si les stations de recharge restent rares et chères en France, des équipementiers français, comme Faurecia et Plastic Omnium, investissent des dizaines de millions d’euros dans les technologies pour véhicules à hydrogène. Selon Patrick Koller, PDG de Faurecia, « il sera possible de diviser le coût de la technologie par deux d’ici à 2025 ».

Toyota et Hyundai, leaders pour le moment

En décembre 2014, Toyota a lancé au Japon sa première voiture à hydrogène destinée au grand public, baptisée « Mirai », qui signifie « futur » en japonais. Il avait été envisagé une production de l’hydrogène dans le véhicule, mais cette solution a été abandonnée. Plusieurs constructeurs ont déjà proposé des flottes commerciales de véhicules propulsés par un moteur alimenté par une pile à combustible, mais Toyota est le premier à lancer une offre grand public.

Quant à Hyundai-Kia, dès 2018, le fabricant a commercialisé deux modèles qui sont le ix35 Fuel Cell et le Nexo40. Ce dernier affiche 666 kilomètres d’autonomie WLTP (756 km NEDC), un rendement de 60 % de sa pile à combustible et un temps de recharge de cinq minutes. Son prix reste élevé, à 66 000 euros bonus écologique déduit. Néanmoins, il est en tête des ventes avec le Toyota Mirai.

Bon à savoir : Renault-Nissan, Ford et Daimler ont scellé un partenariat dans la technologie hydrogène.

L’hydrogène, une énergie verte ?

L’hydrogène est en réalité un vecteur d’énergie plus qu’une source d’énergie. Sa qualité dépend alors de la nature de l’énergie employée pour le produire. L’utilisation d’une énergie renouvelable, en cassant la molécule d’eau dans un électrolyseur, permet de décarboner la chaîne complète, contrairement à l’utilisation d’un gaz naturel émetteur de Co2. En Allemagne, l’hydrogène est actuellement produit grâce à l’énergie fossile, mais le pays s’est fixé comme objectif de produire de l’hydrogène “propre”, à partir de panneaux solaires ou d’éoliennes.

Une voiture roulant à l’hydrogène utilise comme énergie de propulsion une transformation chimique du dihydrogène. Cela signifie qu’elle ne rejette que de l’eau, et n’émet pas directement de gaz à effet de serre. Le véhicule peut se recharger en 5 minutes grâce à une pompe spécifique, et son autonomie peut atteindre 800 km. Une voiture à hydrogène peut donc bien être considérée comme un véhicule propre, mais la fabrication d’hydrogène n’est, quant à elle, pas tout à fait verte.

L’hydrogène améliore entre autres les performances des véhicules électriques. En effet, cela permet d’augmenter leur autonomie et de diminuer leur temps de charge via l’utilisation d’une pile à combustible. Autre atout de l’hydrogène, cette énergie peut être utilisée dans l’industrie et les transports. En étant produite directement sur son territoire, l’hydrogène pourrait permettre à l’Allemagne de gagner en autonomie.

Qu’appelle-t-on véhicule à hydrogène ?

L’appellation « véhicule à hydrogène » désigne plusieurs types de motorisations :

  • La pile à combustible, qui produit dans un premier temps de l’énergie électrique, pour alimenter un moteur électrique, voire plusieurs. Cette solution est notamment utilisée sur les Fiat Panda II H2, Honda FCX … ;
  • Le moteur à hydrogène, qui fonctionne sur le même principe que le moteur à explosion Exemple : le BMW Hydrogen 7;
  • Un système hybride combinant un moteur électrique, dont l’énergie provient d’une pile à combustible, et un moteur classique aux hydrocarbures.

À l’inverse de l’électricité produite grâce au vent ou l’eau, où l’énergie doit être dépensée instantanément, avec l’hydrogène l’énergie peut être stockée et utilisée ultérieurement. Néanmoins, l’hydrogène utilisé, produit au préalable à partir d’eau électrolysée, de méthane reformé, de pétrole ou encore d’agrocarburant, doit être transporté, distribué et stocké dans le véhicule.

Les véhicules et stations hydrogène dans le monde

Fin 2019, le monde comptait 432 stations de ravitaillement en hydrogène, dont 330 accessibles au grand public. Sur les 177 infrastructures implantées en Europe, 87 se trouvent en Allemagne, ce qui en fait le pays leader. Contrairement aux autres pays, la France, qui se place en seconde position, destine la plupart de ses stations aux bus et flottes de véhicules de livraison. En effet, en 2019, 77 stations étaient opérationnelles en France selon la carte Vig’Hy de l’AFHYPAC, dont seulement 20 pour les voitures particulières. Le plan hydrogène dévoilé par Nicolas Hulot en 2017 prévoit l’implantation d’une centaine de stations en 2023 et au moins 400 stations d’ici 2028. Dans le reste du monde, fin 2019, on comptait 178 stations hydrogène en Asie, dont 114 au Japon et 74 en Amérique du Nord, dont la plupart sont implantées en Californie. Le nombre de nouvelles stations hydrogène implantées dans le monde continue d’augmenter en 2020. Il est possible de suivre la progression sur le site de H2 Stations.

Selon l’Agence internationale de l’énergie, 11 200 voitures à hydrogène circulaient dans le monde fin 2018, dont plus de 9 000 Toyota Mirai. Au salon de Francfort en octobre 2019, la marque allemande BMW est entrée sur le terrain en dévoilant son prototype i Hydrogen NEXT, préfigurant le lancement d’une berline à hydrogène en petite série, vers 2022. Audi a aussi annoncé en mars 2019, au salon de Genève, une « h-Tron » de série proposée à la location en 2021. Les constructeurs allemands ont ainsi lancé l’offensive. En février 2019, c’était au tour de PSA d’annoncer l’arrivée d’une flotte expérimentale de véhicules utilitaires à hydrogène pour 2021. Et en octobre 2019, Renault leur a emboîté le pas en annonçant l’arrivée en concessions des Kangoo et Master électriques équipés de piles à combustible.

Combien ça coûte ?

Le développement de cette énergie est onéreux. Pour que cela devienne la voiture du particulier, il faudra encore attendre un peu. En effet, le coût de production d’un véhicule hydrogène est aujourd’hui très élevé. Il est environ trois fois plus élevé que le coût de production d’une voiture thermique. Il faut compter pas moins de 60 000 à 70 000 euros, voire plus, pour acquérir la moindre voiture à hydrogène. Dans un premier temps, ce sont les trains, camions, bus et autres porte-conteneurs qui sont davantage visés par une production de masse. La SNCF a d’ailleurs annoncé faire rouler ses premiers trains hydrogène en 2022. La grande longévité des moteurs électriques employés (jusqu’à un million de kilomètres) pourrait permettre d’amortir en partie le surcoût initial, le coût d’entretien annoncé pour une voiture électrique étant inférieur de 30 à 40 % par rapport aux véhicules classiques.

 

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